Après les insultes du député UDI Meyer Habib, qui a qualifié des parlementaires de «petites connes» suite à leur participation à une danse pour dénoncer l’impact de la réforme des retraites sur les femmes, un collectif d'élues et militantes affirment que «les "petites connes" n’ont pas fini de faire enrager les sexistes de tout poil». Elles appellent à «faire du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, la meilleure réponse qui soit».
« Indigence », « ridicule », « pitreries », « harpies » … ces derniers jours, des hommes, internautes, animateurs d'émission ou politiques, s’en sont donnés à cœur joie pour exprimer en toute décomplexion leur sexisme, jusque dans des émissions grand public. Le comble est atteint quand le député UDI Meyer Habib déclare en plein hémicycle que quelques parlementaires, Clémentine Autain, Elsa Faucillon, Esther Benbassa, Manon Aubry, sont de « petites connes » parce qu’elles ont osé chanter et danser pour dénoncer l’impact de la réforme des retraites sur les femmes.
Face à une réforme des retraites qui va aggraver les inégalités entre femmes et hommes, refuser de céder au désespoir et s’attaquer par l’humour et la parodie au pouvoir apparaît comme insupportable pour toute la phallocratie. La majorité ne ferait-elle mieux pas de s’émouvoir du fait que syndicalistes, universitaires, expertes de l’égalité femmes/hommes, alertent depuis des mois, arguments et chiffres à l’appui, sur le danger que représente la réforme des retraites pour l’autonomie économique des femmes ?
Depuis des mois, les femmes sont au cœur des mobilisations sociales. Elles ont été nombreuses à enfiler un gilet jaune pour enfin être visibles et entendues. Elles sont de nombreuses soignantes à dénoncer l'agonie de l'hôpital public. Et depuis plusieurs semaines, les femmes se lèvent face au projet de réforme des retraites du gouvernement. La chorégraphie « à cause de Macron » a joué un rôle de catalyseur, reprise dans près d’une centaine de villes, par des femmes de tous horizons, toutes générations, dans les cortèges, devant les hôpitaux, les universités, les gares ou avec les travailleuses en grève de l’hôtel Ibis Clichy-Batignolles.
Déguisées en « Rosie la Riveteuse », avec bleu de travail, fichu rouge, gants jaunes, elles dénoncent, avec cette icône internationale devenue un symbole féministe, les conditions de vie et de travail des femmes, bien moins payées en moyenne que leurs homologues masculins. Elles exigent le retrait d’un projet de loi qui diminuera d’autant plus leurs pensions, parce qu’elles cumulent bien plus que les hommes « les petits jobs en pointillés » et les interruptions d’activité. Dans un système à points prenant en compte désormais toute la carrière, elles seront les « grandes perdantes », contrairement à ce qu’a affirmé Edouard Philippe.
Des femmes parlementaires ont eu le courage de les rejoindre et tant mieux. Si elles sont des « petites connes », alors nous le sommes aussi et nous en sommes fières. Les « petites connes » n’ont pas fini de faire enrager les sexistes de tout poil, à la télévision comme à l’Assemblée, à refuser le mépris et à exiger le retrait d’une réforme profondément injuste. Ils détestent notre joie car elle est communicative et nous donne l’énergie de lutter contre l’avenir morose qu’ils veulent nous imposer. Alors nous, « petites connes », continuerons de danser partout où nous le voudrons et appelons à faire du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, la meilleure réponse qui soit.
Signataires :
Verveine Angeli, secrétaire nationale de l'Union syndicale Solidaires
Ana Azaria, présidente de Femmes Égalité
Sophie Binet, CGT
Leila Chaibi, Députée européenne LFI
Lou Chesne, Attac et co-coordinatrice de l'initiative "à cause de Macron"
Myriam Chopin, historienne
Annick Coupé, secrétaire générale d'Attac
Laurence De Cock, historienne
Christine Delphy, sociologue, CNRS
Caroline Fiat, députée nationale LFI
Sigrid Gérardin, secrétaire nationale FSU
Raquel Garrido, avocate chroniqueuse
Murielle Guilbert, secrétaire nationale Union syndicale Solidaires
Aurore Lalucq, députée européenne Place publique
Mathilde Larrère, historienne
Claire Lejeune, co-secrétaire fédérale des Jeunes Écologistes
Gaëlle Martinez, déléguée générale Solidaires Fonction Publique
Caroline Mecary, avocate
Claire Monod, Coordinatrice Nationale de Génération.s
Mathilde Panot, députée nationale LFI
Anne-Sophie Pelletier, Députée européenne LFI
Marie Pochon, Secrétaire Générale de Notre Affaire à Tous
Christine Poupin, porte-parole du NPA
Sandra Regol, secrétaire nationale adjointe d’EELV
Aude Rossigneux, ancienne journaliste
Eva Sas, Porte Parole d'EELV
Rachel Silvera, économiste, Université Paris-Nanterre
Charlotte Soulary, co-fondatrice du collectif Chair
Sophie Taillé-Pollian, sénatrice Génération.s
Marie Toussaint, députée européenne EELV
Aurélie Trouvé, porte-parole d'Attac
Eliane Viennot, historienne
Youlie Yamamoto, Attac et co-coordinatrice de l'initiative "à cause de Macron"
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